Enjeux normatifs et moraux de la formation à la recherche en sciences sociales
Les sessions du GT18 proposent d’interroger les référentiels normatifs des formations à la recherche dans les pays francophones, que ce soit l’injonction à la mobilité internationale, à l’utilisation de l’anglais scientifique pour la valorisation des recherches ou encore l’adhésion à une posture réflexive normative bousculée par certains des nouveaux objets de la sociologie et des sciences sociales.
L'élargissement de l’accès à l’information, la banalisation des voyages internationaux et l’hyperconnectivité ont profondément modifié nos sociétés contemporaines. Le rapport aux nouvelles technologies de l’information et de la communication rend possible une rencontre des esprits, lorsque la mobilité des corps n’est pas toujours possible. Le premier axe de cet appel interroge la mobilité étudiante et scientifique, fondements des programmes diplomatiques des pays occidentaux. Les programmes de coopération binationaux, européens ou internationaux visant à permettre les échanges universitaires sont multiples : bourses de terrain de recherche, bourses de réseautage, programme d’échanges ou d’invitation… L’accès aux travaux scientifiques du monde entier joue également un rôle fondamental dans la construction des ancrages théoriques, ne nécessitant plus d’attendre parfois pendant des années des traductions d’ouvrage ou d’article. Dans ce contexte, la mobilité des jeunes chercheur·e·s et leur inscription dans des réseaux internationaux peuvent s’analyser comme une condition sine qua non de leur formation. Comment se vivent ces injonctions à la mobilité ? Que produisent-elles sur les trajectoires personnelle, professionnelle et familiale des doctorant·e·s et des jeunes chercheur·e·s ? Quel effet ont-ils sur la construction identitaire sur ces jeunes chercheur·e·s de la « génération Erasmus » ?
Le second axe de cet appel permettra de prolonger les réflexions entamées autour de la prédominance de la langue anglaise dans les publications scientifiques lors de deux journées d’étude qui se sont tenues à Ottawa en 2018 et 2019. La généralisation de l’accès à l’information promeut l’utilisation d’un anglais international facilitant la communication entre scientifiques. Les jeunes chercheur·e·s francophones en sciences sociales sont pris entre un désir de faire connaître largement leurs travaux et le désir d'utiliser, voire défendre, leur langue de pensée.
Le troisième axe s’intéressera plus particulièrement à la posture éthique et réflexive des chercheur·e·s en sciences sociales face aux nouveaux objets, mais aussi aux nouvelles façons de travailler de manière inter- et transdisciplinaire, dont s’emparent tout particulièrement les jeunes sociologues. De l’intelligence artificielle à la guerre en passant par les recherches intersectionnelles ou encore sur le lien animal, la multiplicité des situations et des croisements avec d’autres disciplines impose la mise en œuvre d’un processus réflexif permanent sur la posture, la juste distance ou encore la responsabilité scientifique et morale du sociologue. Les normes fondatrices du positionnement des chercheur·e·s en sciences sociales sont-ils encore opérationnels face à ces nouveaux objets et ce nouveau monde ? Cette question pourra s’étendre également à l’usage de nouvelles méthodes dans le recueil de données telle que les entretiens sur Internet, l’observation participante ou non d'espaces numériques, l’analyse qualitative informatisée, les registres numériques en temps réel, les journaux intimes numériques…
Les propositions de communication devront s’inscrire dans la thématique générale du congrès de l’AISLF et dans celle du GT18, dont les sessions ne sont pas réservées aux jeunes chercheur·e·s : l’ensemble de la communauté francophone est invité à contribuer aux réflexions sur les enjeux normatifs et moraux de la formation à la recherche en sciences sociales.