Pour un engagement moral du sociologue
M. Gerard CREUX IRTS de Franche-Comté | BESANÇON - France
Résumé : Cette intervention se propose d’interroger les rapports que le chercheur entretient avec son objet et les résultats de ses travaux, et plus encore, son engagement politique. Mais plutôt que de s’intéresser à l’usage des connaissances produites, il semble plus pertinent de partir d’un autre point de vue : quelle est la posture de départ du chercheur dès lors que son objet de recherche traite du "sensible" et de la "différence", ou pour explicitement de « La misère du monde » pour reprendre les termes de Pierre Bourdieu ? En effet, il semble illusoire de croire qu’un chercheur est neutre vis-à-vis de son objet d’étude sauf à penser qu’il est doté intrinsèquement d’une « neutralité axiologique » qui n’est jamais qu’un point de vue moral sur la recherche, et tend à anéantir toute posture critique. Ainsi, en partant de l’hypothèse que le monde se caractérise par une injustice repérable par le biais des différences sociales et culturelles entre les individus, que le « sens commun politique » justifie par le prisme d’un darwinisme social idéologique, le sociologue (sans pour autant considérer que son discours est « vrai », mais que sa démarche rationnelle l’amène vers une connaissance raisonnée du social), ne se doit-il pas de prendre une position engagée en amont et au-delà de ses connaissances scientifiques afin de participer à un monde "plus juste", en se rappelant que « la sociologie ne vaudrait pas une heure de peine si elle ne devait avoir qu’un intérêt spéculatif » (E.Durkheim) ?