Le suicide des appelés est-il une affaire de santé publique ? Analyser l’économie morale d’un problème social dénié
Mme Angeliki DRONGITI Université Paris 8 - Cresppa-CSU | PARIS - France
Résumé : Le suicide des appelés grecs constitue un phénomène obscur et méconnu pour la société grecque. Problème public, problème de santé publique ou problème politique, le suicide des conscrits n’a pourtant pas franchi le stade du mythe, un registre entre l’imaginaire et le réel qui se transporte d’une époque à l’autre sous forme de récit oral, malgré la forte médiatisation du phénomène, des débats publics et des actions pour sensibiliser l’opinion publique menés par les groupes antimilitaristes. Cette communication répondra alors à la question suivante : si le suicide des conscrits devrait constituer un problème d’intérêt public, quels sont les facteurs qui ont concouru pour qu’il ne soit finalement qu’une tragédie familiale ? En m’appuyant sur une mosaïque des données (des entretiens semi-directifs avec des militaires psychiatres, des appelés suicidaires et des membres d’associations antimilitaristes, des archives confidentielles et des matériaux recueillis par une observation participante dans un hôpital psychiatrique militaire), j’analyserai les enjeux moraux qui empêchent la reconnaissance de ce phénomène comme problème social (Castra, 2003; Gusfield, 2009). À partir de ce cas spécifique et à l’aide des analyses du courant de critical suicidology, (Button, 2006; Marsh, 2015; Mills, 2017) cette communication ambitionne de soulever le mystère de l’économie morale des politiques publiques du suicide et de sa prévention.