Étudier les usages numériques du « vivre avec le trouble »
Mme Laurence ALLARD Université de Lille - IRCAV EA185 - Sorbonne Nouvelle | PARIS - France
Résumé : Etudier les promesses du web expressif nous a amené à décrire des usages qui donnent du pouvoir dans ce qui demeure des rapports de pouvoir. A ce constat d’ambivalence, nous voudrions ajouter le trouble à la fois comme résultat et comme domaine de recherche. Une enquête nous a conduit à enquêter, depuis 2018, au sujet de groupes Facebook liés à la collapsologie, cette mise en récit multidisciplinaire d’un proche effondrement de la civilisation thermo-industrielle. Lectrices et lecteurs de Pablo Servigne "entrent" dans des groupes Facebook à la fois de par l’anxiété et de par le chiffre, puisque les faits scientifiques articulés dans le récit collapsologiste convergent vers l’événement terminal de l’effondrement. Sont crées et administrés des groupes où se trouve régulée la publication de posts entre narrations de soi effondrées et données en tout genre (cartes, courbes, articles). Au constat d’ambivalence de l’expressivisme 2.0 reproduisant des rapports de pouvoir en temps de crise s’ajoute l’observation d’un état de trouble en temps d’effondrement, qui vient déplacer hiérarchies sociales et normativités (déclassements volontaires, reconversions professionnelles, réorientations scolaires, hydridations idéologiques, de la high tech au low tech, de la finance à la permaculture, de l’ingénierie à la boulangerie, des libertaires aux survivalistes). De ce terrain, émergent les turdies studies, l’étude des usages numériques d'un vivre avec le trouble.