AISLF Tunis 2021

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Communication #449 présentée dans le CR29 - Sociologie de la science et de l'innovation technologique

Faire parler les morts sans les couper : ethnographie de l’intégration de l’imagerie post-mortem dans un centre de médecine légale

Mme Séverine REY
Haute Ecole de Santé Vaud | Lausanne - Suisse
(avec : Celine SCHNEGG et Alejandro DOMINGUEZ)

Résumé : Si l’autopsie chirurgicale occupe encore aujourd’hui une place centrale dans le dispositif d’enquête médico-légale, plusieurs techniques d’imagerie médicale complètent, depuis une quinzaine d’années, cet examen. Développées dans certains centres spécialisés, ces techniques transforment les modalités de démonstration des causes du décès: CT-scan et IRM permettent de voir l’intérieur du corps sans l’"ouvrir". Outre ce pouvoir de visualisation et de virtualisation des corps, les promoteurs de l’imagerie forensique soulignent leur apport en termes d’objectivité, de précision et de neutralité puisqu’elles limitent l’intervention humaine sur les corps. Certaines de ces techniques induisent également une transformation de la temporalité et brouillent la frontière entre vivant et mort: l’angiographie post-mortem permet, en rétablissant artificiellement la circulation sanguine, de simuler le vivant durant l’examen et d’opérer un retour dans le temps. L’intégration de ces techniques dans le dispositif médico-légal suscite toutefois des tensions, notamment du point de vue de leur force probatoire qui, dans certains cas, concurrence celle de l’autopsie conventionnelle. Sur la base d’une étude ethnographique dans un centre de médecine légale à la pointe de l’imagerie post-mortem, nous proposons d’analyser les transformations engendrées par ces techniques, du point de vue des pratiques d’enquête, mais aussi des manières d’envisager les corps morts, et les enjeux qu’elles soulèvent.