Le non-recours aux services d’aide par les proches aidant·e·s comme résistance morale à leur enrôlement par les politiques publiques
Mme Anne PETIAU
Centre d'étude et de recherche appliquées | BUC - France
(avec : Barbara RIST)
Résumé : Le développement d’une politique de soutien en faveur des aidant.e.s révèle le modèle familialiste de nos politiques d’accompagnement de la perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap. Le développement de diverses formes de soutien (formation, rémunération, statut, etc.) dans un contexte où le libre-choix de s’engager dans l’aide n’est pas assuré (pénurie de structures d’accueil) et où le maintien à domicile est favorisé, peut être vu comme un enrôlement des proches aidant.e.s par les politiques publiques. Nous proposons d’aborder la question du non-recours (Warin, 2016) et des recours partiels aux services d’aide comme des formes de résistance à cet enrôlement. On s’intéresse plus particulièrement à la dimension morale de ces résistances. Un certain nombre de recours/non-recours aux services d’aide en faveur des aidant.e.s ou en faveur des aidé.e.s donne lieu à des conflits normatifs. La formation aux gestes techniques ou la rémunération peuvent être refusées au nom de la naturalisation de l’aide au sein de la famille. Autre exemple, le recours aux intervenant.e.s professionnel.le.s peut donner lieu à des conflits moraux autour des frontières de l’intime, de la définition du « bon soin » pour l’aidé (Tronto, 2009), et in fine de la « vie bonne » (Breviglieri 2012 ; Sen, 2000). Au travers de ces conflits, c’est l’esprit des politiques publiques et la place des proches aidant.e.s dans la solidarité qui sont mis en cause.