Agir selon des normes morales ou agir selon des sentiments moraux ? L’exemple des professionnels du travail éducatif à l’école primaire
Mme Frédérique GIULIANI Université de Genève - Faculté de psychologie et de science de l'éducation | Genève 4 - Suisse
Résumé : Cette communication propose d’interroger la manière dont les enjeux moraux sont socialement mis en forme dans le cadre du travail éducatif accompli par les éducateurs sociaux en contexte scolaire à l’égard des élèves en difficulté et de leurs familles. Comme le souligne Rawls, Weber ou Smith, les sentiments moraux ont une origine rationnelle et une dimension judicatoire. Autrement dit, un acte moral implique un jugement, lequel repose sur un système d’arguments perçu comme convaincant par celui qui l’endosse. Or, nous faisons l’hypothèse que certains contextes institutionnels d’exercice du travail social, où les professionnels ont peu de prises sur la définition des finalités de leur activité dès lors que celle-ci est entièrement déterminée de l’extérieur, par leur hiérarchie, privent du même coup ceux-ci de la possibilité de produire un jugement quant à ce qu’il convient de faire dans telle ou telle situation en vue d’une action bonne. Les professionnels se trouvent ainsi réduits à déterminer leur agir vis à vis des populations eu égard à des normes morales. Cependant l’autonomie de jugement est un enjeu de luttes pour certains professionnels. Dans d’autres contextes institutionnels où celle-ci est revendiquée par les professionnels, ces derniers agissent non plus au regard de normes morales mais selon des sentiments moraux.