AISLF Tunis 2021

Recherche de résumés des communications présentées


Communication #886 présentée dans le CR03 - Études socio-juridiques et sociologie du droit

La médication psychiatrique dans la société morale : les tribunaux ont-ils remplacé les asiles?

Mme Emmanuelle BERNHEIM
UQAM - Dpt. des Sciences Juridiques | MONTRÉAL - Canada
(avec : Guillaume OUELLET, Pierre PARISEAU-LEGAULT et Nicolas SALLÉE)

Résumé : Au Québec, l’administration de la médication psychiatrique est soumise aux mêmes exigences juridiques que tout traitement, soit le consentement libre et éclairé. En raison d’abus asilaires notoires ayant eu cours jusque dans les années 1960, les droits des patients psychiatriques sont au cœur des dispositifs juridiques et les processus judiciaires doivent en assurer la mise en œuvre. Un terrain ethnographique mené à la Commission d’examen, tribunal administratif qui fait le suivi des personnes déclarées criminellement non responsables ou inaptes à subir leur procès et qui peut les placer en détention ou les libérer en fonction du risque qu’elles représentent pour la sécurité du public, permet cependant de mettre en question la fonction strictement thérapeutique de la médication psychiatrique et le rôle des tribunaux à cet égard. La recherche démontre que : 1- les personnes concernées vivent dans la précarité socioéconomique; 2- la preuve du risque n’est pas systématiquement établie, le débat judiciaire portant plutôt sur le style de vie, et 3- bien que la Commission ne détienne aucune compétence en matière de traitement, la médication y est systématiquement discutée, souvent présentée comme une condition de la libération. Ces résultats semblent confirmer que la médication psychiatrique joue le rôle de contrôle social que certains auteurs lui attribuent, transposant l’asile hors les murs, et mettent en lumière le rôle de premier plan qu’y tient la justice.