Absorber les résistances locales aux injonctions internationales en éducation
Mme Sarah CROCHé Université de Picardie Jules Verne - Dpt. de Sciences de l'éducation | AMIENS - France
Résumé : Au départ de l’analyse des pratiques d’enrôlement développées par les enseignants de pays d’Afrique (Sénégal surtout) pour que les élèves adhèrent au discours de la religion à la place de celui de la science occidentale, cette communication s’intéresse aux résistances locales aux injonctions internationales dont Charlier (2015) a montré qu’elles pouvaient entraver l’installation de réformes ou en pervertir l’esprit. Elle expose d’abord la façon dont les enseignants résistent au processus d’édification d’une « culture mondiale d’éducation » et le transforment en un instrument d’identité. Elle présente ensuite en quoi ces résistances relèvent d’un « militantisme islamique contestataire » et sont intégrées à un « dispositif de production de l’homme », qui est diffusé dans tous les pays par l’expertise que font circuler les organisations internationales et de prêt. Elle veut enfin montrer qu’au lieu d’affronter les résistances, les organisations internationales ont développé des techniques douces afin qu’elles n’entravent pas leurs projets. Le procédé consiste à ajuster la doctrine en élargissant le cadre réglementaire pour qu’il puisse englober les pratiques réelles des acteurs et les spécificités nationales. Ce relâchement est toutefois provisoire. Il peut être vu comme « une ruse qui permet à l’organisme prescripteur de préserver sa sphère d’influence en gardant l’intégralité de ses affiliés » (Charlier & Croché, 2017), le resserrement des contraintes ayant lieu par la suite.